Quand les Médias Transforment Votre Investissement Locatif en Crime contre l'Humanité
Ou comment j'ai appris à ne plus m'inquiéter et à aimer la diabolisation du propriétaire
Par Maître Thomas CARBONNIER, Avocat fiscaliste et Président de l'UNPI 95
Mes chers confrères propriétaires, permettez-moi de vous poser une question existentielle : à quel moment exactement êtes-vous devenus l'équivalent moral d'un baron-pilleur du XIIe siècle ? Était-ce lors de l'achat de votre studio de 22m² à Cergy ? Ou peut-être au moment fatidique où vous avez osé demander un loyer conforme au marché ?
Si vous allumez votre télévision un matin quelconque, vous découvrirez avec stupeur que vous êtes désormais classé quelque part entre le requin blanc et le dentiste sadique dans la pyramide des êtres malfaisants. Le propriétaire immobilier, ce nouveau Belzébuth en mocassins, occupe désormais 73% du temps d'antenne consacré aux problèmes de société. Les 27% restants ? Les extraterrestres et la météo.
Les médias ont développé un talent remarquable pour transformer chaque relation locative en tragédie shakespearienne. Prenons un exemple type : "Témoignage : Céline, 28 ans, contrainte de vivre dans 18m² pour 850€". Le plateau télé s'obscurcit, violons mélancoliques en fond sonore. Ce que le reportage omet soigneusement de mentionner ? Que ledit 18m² se trouve à 200 mètres du Panthéon, rénové à neuf, avec vue sur le jardin du Luxembourg. Détails négligeables, évidemment.
La narration médiatique a créé une dichotomie manichéenne digne d'un film de super-héros : d'un côté, le locataire-victime, être pur et lumineux ; de l'autre, le propriétaire-tyran, personnage unidimensionnel dont l'unique motivation est d'extraire jusqu'au dernier centime des poches de ses malheureux occupants tout en ricanant dans son château.
Permettez-moi de nuancer ce tableau idyllique avec cette chose étrange et délaissée qu'on appelle... la réalité.
Parlons peu, parlons fiscalité. Ce sujet passionnant qui fait briller les yeux de tout investisseur ! Enfin... jusqu'à ce qu'il découvre la réalité de notre système fiscal, cette magnifique addiction française qui ne date pas d'hier.
Car oui, comme le soulignait déjà Frédéric Bastiat au XIXe siècle, nos gouvernants considèrent l'impôt comme une "rosée fécondante". Le grand économiste nous alertait sur cette illusion : l'État prélève sur le sol ce qu'il prétend ensuite lui redonner en pluie bienfaisante.
Cent soixante-cinq ans plus tard, rien n'a changé. Ou plutôt si : c'est devenu pire.
Entre l'IFI, la CSG/CRDS, les prélèvements sociaux à 17,2%, la taxe foncière qui augmente comme une tumeur maligne, les charges non récupérables, et les travaux non déductibles, votre "enrichissement scandaleux" se situe quelque part entre la rentabilité d'un Livret A et celle d'une collection de timbres moldaves.
Les médias adorent brandir des "loyers records" sans jamais évoquer la charge fiscale. C'est comme présenter le chiffre d'affaires d'une entreprise en oubliant de mentionner ses coûts. Un loyer de 1500€ ? Formidable ! Après avoir retiré 350€ de charges, 200€ de taxe foncière, 450€ d'impôts et prélèvements sociaux, constitué une provision pour le remplacement futur de la chaudière, il vous reste... la satisfaction morale d'être traité de profiteur sur tous les plateaux télé.
Notre pays entretient avec l'impôt une relation qu'un thérapeute qualifierait de "toxicodépendance sévère". Depuis Louis XIV qui a compris que "gouverner c'est dépenser", en passant par Philippe le Bel et Richelieu, l'État français a fait de la pression fiscale un art de vivre.
L'histoire fiscale de notre pays est éloquente : après la Première Guerre mondiale, la dette publique dépassait 150% du PIB. L'impôt sur le revenu, créé en 1914 avec un taux maximal de 2%, a rapidement grimpé pour atteindre des sommets dans les années 1920, avec des taux particulièrement élevés pour les célibataires sans enfant (objectif : relancer la natalité). Aujourd'hui, avec nos 57% de dépenses publiques (contre 45% en moyenne européenne), nous restons les champions toutes catégories.
Et le propriétaire immobilier dans tout ça ? Il est l'héritier malgré lui d'une formidable inversion historique. Car voici le sel de l'histoire : la Révolution de 1789 a été conçue POUR protéger les riches propriétaires fonciers !
Comme l'a magistralement démontré Henri Guillemin, la Révolution française n'était pas une révolution populaire mais une révolution bourgeoise. Le système fiscal imaginé par les révolutionnaires avait un but précis : favoriser la domination des riches, incarnée par la propriété immobilière. L'impôt unique sur la propriété foncière ? Une trouvaille géniale pour que les bourgeois propriétaires contrôlent le système !
Et le suffrage censitaire ? Seuls ceux qui payaient un montant minimum d'impôt avaient le droit de vote. Autrement dit : pas de propriété, pas de vote. La "République" était une ploutocratie assumée. Les pauvres n'avaient qu'à se taire.
Ce système, source de grandes injustices dès l'origine, n'a jamais vraiment disparu. Il s'est transformé, complexifié, retourné. Et voici la délicieuse ironie : le propriétaire immobilier, autrefois protégé et privilégié par le système révolutionnaire, est devenu aujourd'hui le bouc émissaire médiatique numéro un !
De dominants à démons en deux siècles. Chapeau pour le revirement narratif !
Il faut savourer cette trajectoire historique dans toute son absurdité. En 1789, les révolutionnaires ont guillotiné l'ancienne idéologie fiscale pour en créer une nouvelle, taillée sur mesure pour les propriétaires bourgeois. Le député Guillotin proposait l'égalité devant le juge (et accessoirement sa fameuse machine) ; ses collègues, eux, organisaient l'inégalité devant l'impôt et le vote.
Pendant des décennies, le propriétaire foncier a été le pilier du système. La contribution foncière représentait l'essentiel des rentrées fiscales. Les "Quatre Vieilles" contributions directes avaient toutes pour base la propriété immobilière. C'était l'âge d'or du propriétaire-citoyen, celui qui comptait, celui qui votait, celui qui dirigeait.
Et puis... le capitalisme industriel est arrivé. La richesse mobilière (actions, obligations, titres) a explosé. Entre 1850 et 1900, le capital mobilier a été multiplié par dix tandis que l'immobilier doublait à peine. Les nouveaux riches n'étaient plus les propriétaires fonciers mais les capitalistes, les financiers, les industriels.
Le système fiscal, toujours en retard d'une guerre, continuait de taper sur l'immobilier pendant que la finance dansait. Résultat ? Les propriétaires terriens, autrefois dominants, se retrouvaient à payer pour un système qui les dépassait.
Aujourd'hui, le retournement est complet. Le propriétaire immobilier, vestige d'un capitalisme "à l'ancienne", visible, localisable, taxable, est devenu la cible parfaite. Les médias l'adorent : il est concret, il a une adresse, on peut filmer son immeuble.
Pendant ce temps, les vrais capitaux circulent dans des paradis fiscaux, les GAFAM optimisent à Dubaï, et les cryptomonnaies narguent Bercy. Mais ça, c'est trop complexe à expliquer au JT. Alors on filme le méchant propriétaire qui ose demander 850€ pour 18m² dans le Quartier Latin.
L'histoire a le sens de l'humour.
Face à ce déluge de désinformation médiatique et à cette pression fiscale digne d'un roman dystopique, l'UNPI 95 (Union Nationale des Propriétaires Immobiliers du Val-d'Oise) se positionne comme le phare intellectuel dans la brume du populisme immobilier.
Ce que nous vous apportons :
Contactez-nous :
UNPI 95 - Union Nationale des Propriétaires Immobiliers du Val-d'Oise
Chambre des Propriétaires et Copropriétaires Associés
Adresse : 5 avenue Paul Herbé, 95200 SARCELLES
Téléphone : 09 73 51 14 60
Mobile : 06 95 98 98 78
Site web : https://95sarcelles.unpi.org
Parce qu'être propriétaire ne devrait pas nécessiter un doctorat en droit fiscal, une maîtrise en psychologie pour supporter les reportages télévisés, et un abonnement à vie aux anxiolytiques.
Ah, la spéculation ! Ce mot magique qui permet de disqualifier instantanément tout discours raisonnable. Dans l'imaginaire médiatique, le propriétaire est forcément un spéculateur enrichi qui s'endort sur des liasses de billets.
La réalité ? Madame Dupont, 67 ans, qui loue l'appartement dont elle a hérité de ses parents pour compléter sa retraite de 1200€. Monsieur Martin, qui a investi ses économies dans un studio pour constituer un complément de revenu après 35 ans de labeur. Ces gens ne sont pas des requins de la finance, ce sont vos voisins. Ce sont peut-être même vos parents.
Mais cette réalité ne fait pas d'audimat. Elle ne nourrit pas la colère nécessaire au bon fonctionnement du cirque médiatique. Alors on préfère interviewer le cas extrême, l'exception pathologique, et en faire la norme. C'est tellement plus simple.
Et pendant ce temps, nos retraités partent au Portugal, attirés par des conditions fiscales avantageuses sur leurs pensions. Résultat ? L'État français perd non seulement les recettes fiscales (IR, TVA, taxes locales), mais aussi la consommation locale de ces citoyens. Bravo pour la stratégie !
Face à la "crise du logement" (dont les causes réelles mériteraient un traité de 500 pages), les médias relaient avec enthousiasme chaque nouvelle proposition réglementaire, aussi absurde soit-elle. Encadrement des loyers ? Magnifique ! Peu importe que l'histoire montre que cela réduit l'offre et dégrade la qualité du parc locatif. Préemption systématique ? Excellent ! Qui se soucie de savoir si les collectivités ont les moyens de gérer ce patrimoine ?
Le paradoxe français atteint ici son apogée : on multiplie les contraintes sur les propriétaires privés, on alourdit leur fiscalité (qui rappelons-le, porte sur des revenus hypothétiques depuis 1789 !), on complexifie leurs obligations... et on s'étonne ensuite qu'ils désertent le marché locatif.
C'est comme insulter son boulanger quotidiennement, lui imposer 150 normes sanitaires contradictoires, le taxer à 60% de ses revenus, puis s'indigner qu'il n'y ait plus de pain frais le matin.
Comme l'observait Frédéric Bastiat, l'État devient cette grande fiction à travers laquelle tout le monde s'efforce de vivre aux dépens de tout le monde. Cette observation reste d'une actualité troublante.
Le problème français est systémique : dès qu'un citoyen sort de la misère, il est immédiatement taxé au point qu'il a le sentiment, à juste titre, que ses efforts sont anéantis. Le médecin libéral parisien qui vivait autrefois confortablement dans le haut de la classe moyenne n'est souvent plus que dans la classe moyenne tout court ! Notre système n'encourage pas les Français à se défoncer dans leur travail ou à créer une entreprise.
Et les médias, dans tout ça ? Ils alimentent ce système en désignant des boucs émissaires faciles. Le propriétaire immobilier est le parfait coupable : visible, nécessaire, et incapable de se défendre efficacement face à une caméra de télévision.
Tommy Douglas, ancien Premier ministre socialiste du Canada, racontait une fable instructive : celle de petites souris qui élisaient régulièrement des gouvernements de gros chats (noirs, puis blancs, puis mi-noirs mi-blancs pour faire "cohabitation"). Le problème n'était évidemment pas la couleur du chat, mais qu'ils étaient... des chats.
En France, le problème n'est pas la couleur politique. C'est que notre système politique est largement dominé par ceux qui vivent de l'impôt et non par ceux qui le paient. Une part importante de nos parlementaires sont des fonctionnaires ! Comment espérer qu'ils votent des réformes qui réduiraient le périmètre de l'État ?
Les médias, largement subventionnés, font partie de ce système. Ils ne mordent pas la main qui les nourrit. Alors ils désignent d'autres coupables : les propriétaires, les entrepreneurs, les "riches". Tout sauf le système lui-même.
Chers journalistes, chers téléspectateurs, chers décideurs politiques : et si nous osions la nuance ?
Un propriétaire n'est pas un saint, certes. Mais il n'est pas non plus un démon. Il est un acteur économique qui investit son capital, prend des risques, assume des responsabilités et fournit un service essentiel : un toit.
La relation locative est, par nature, contractuelle. Elle implique des droits et des devoirs réciproques. Transformer systématiquement cette relation en lutte des classes 2.0 ne résout aucun problème. Cela en crée de nouveaux.
Le véritable scandale n'est pas le prix des loyers dans les zones tendues. Le scandale est l'absence de politique cohérente du logement depuis quarante ans, la bureaucratie kafkaïenne qui décourage la construction, les normes qui s'empilent comme des poupées russes, et une fiscalité qui punit l'investissement privé depuis... 1789.
Mais tout cela est trop complexe pour un reportage de trois minutes au JT de 20h. Trop nuancé pour un tweet rageur. Trop systémique pour une solution miracle.
Alors continuons à désigner des boucs émissaires. C'est tellement plus simple. Et pendant ce temps, nos concitoyens les plus productifs continueront leur exil fiscal, nos jeunes diplômés partiront chercher fortune ailleurs, et notre économie s'enfoncera un peu plus dans la médiocrité.
Les analyses historiques nous rappellent que l'État tend naturellement à élargir le cercle de ses attributions et à multiplier le nombre de ses agents, jusqu'à acquérir des proportions écrasantes. Nous y sommes.
Maître Thomas CARBONNIER est avocat fiscaliste et Président de l'UNPI 95. Il défend au quotidien les propriétaires face à l'arsenal réglementaire français, armé d'un Code général des impôts, d'une connaissance approfondie de l'histoire fiscale française, et d'un sens de l'humour résolument nécessaire à la survie dans cette profession.